SOMMAIRE du Numéro 3 :

Travaux d'autrefois : le tuont chez Noré

La vie municipale voici 200 ans : François Andrault, le 2ème maire

Chansons saint-sauvantaises : 3. Conseils aux feuilles à marier

Coutumes : les sobriquets et surnoms

Souvenirs : fin d'été

Patois : la grille à Suzanne

Les archives de Faljoie : des parchemins de six siècles

Les loups aux 18ème et 19ème siècles : des battues et des primes

La flore locale


Travaux d’autrefois

 

LE TUONT JEUDI CHEZ NORÉ

 

Suzanne POINSTEAU

 

Le tuont tchi ? – Mais l’goret ben sûr ( sauf votre respect )

 

Il faut vous dire qu’autrefois, quand on prononçait le nom de cet animal, on le faisait toujours suivre de l’expression "sauf votre respect", sinon cela eût été irrespectueux pour l’interlocuteur, ça m’a toujours interpellée. Mais c’était ainsi. Pourquoi ? Je n’en ai aucune idée. "On tuait" ou bien "on faisait boucherie" - Et ma foi, de cette façon, c’était toujours une fois de moins à prononcer le mot "goret" ( sauf votre respect ).

On tuait généralement une fois par an ; parfois plus si on était goussé, c’est à dire si on avait plus de moyens - on tuait, en gros, de la Toussaint à Pâques : les mouches étant moins nombreuses et moins voraces à cette époque de l’année – car en ce temps-là, jeunes gens, il n’y avait pas de réfrigérateurs et encore moins de congélateurs à la campagne.

 

On arrêtait un jour correspondant à une conjonction de facteurs favorables.

1) La saison et la température : on vient de le dire, le plus frais possible.

2) Il valait mieux tuer en jeune lune, sinon la viande diminuait de moitié à la cuisson (!)

3) Si le goret (sauf votre respect) était une coche, c’est à dire une femelle n’ayant jamais mis bas (autrement ol orait été LA MERE GORETTE, chanson bien connue de notre région). Il fallait surtout veiller à ce qu’elle ne fût point en chaleur car la viande en aurait été gâtée. Petites parenthèses en passant : les congénères mâles n’étaient guère entreprenants et ne pouvaient succomber aux charmes de la gent féminine, vu que le castrou était passé par là, et même que les chiens de la maison appréciaient son passage.

4) En ce qui concernait la maîtresse de maison : Halte-là !…

Pour certains jours, c’était niet, niet, niet, car en cas contraire, ça faisait tourner la viande, disait-on également (comme pour la mayonnaise).

Bon ! Toutes les conditions sont remplies. On définit un jour, ce sera jeudi.

Or donc, les jours précédents, on s’éfeneillait, c’est à dire qu’on s’affairait fébrilement, surtout les femmes qu’étiont ben éfenéaïes bounes gens. Alors on cherchait dans la cave ou les bâtiments, rangés au fur et à mesure depuis la dernière tuerie, les pots de cré (de grès), les pâtissières (terrines) les salous et les pinates, c’est à dire le saloir de la chanson : "Ils étaient trois petits enfants qui s’en allaient glaner au champ" - Vous en souvenez-vous ? Ecrivez-nous.

Tous ces ustensiles étaient rassemblés pour souffrir ensemble dans dau lessis bouillant (eau additionnée de cendres, ou plus tard de lessive Saint-Marc), à moins qu’ils ne fussent heureux de prendre un bain collectif et de se voir offrir un lifting.

On aiguisait le serpâ, on recherchait la mailloche et le tréped. On lavait soigneusement la ou les chaudières. On épluchait les oignons : pour indication : 7 livres d’oignons pour 7 livres de viande, et ce pour faire environ 150 boudins, parfois moins. Tout ça est un souvenir tout à fait approximatif. Attention !…on épluchait ou plutôt on piumait les oignons la veille de la tuerie, mais il était impératif de les couper seulement le lendemain, sinon, ça faisait mourir le patron, c’est à dire le maître de maison. Je suppose qu’on se pliait facilement à cette "règle", étant entendu qu’ainsi les oignons ne s’oxydaient pas (opinion toute personnelle).

On préparait une botte de paille ou deux (ou plusieurs brassées avant le temps des botteleuses). La veille, le goret (sauf votre respect) était soumis à la diète : on pensait évidemment aux laveurs de tripes du lendemain. Tout ça nous mène au jeudi matin.

 

La bête silait

 

Dès au matin et aussi toût qu’on pevait, deux ou trois gaillards se présentaient dans le tet aux gorets, la soue, avec en main des cordes passablement dissuasives. Ils immobilisaient le bestiau et le conduisaient sur une couche de paille préparée au biâ mitan de la cour. Cette pauvre bête était ainsi maîtrisée, les deux pattes arrière attachées à un piquet fiché en terre. Parfois le patron ne voulait pas saigner lui-même l’animal avec qui il avait par trop sympathisé. Il demandait alors l’aide d’un vieux sage aguerri qui ne ratait jamais son coup : tchau gars piantait son coutâ "saigne goret" au boune endret dau gargana.

La bête silait, on l’entendait de lin, oui de très loin car âmes sensibles, sachez qu’autrefois, il y a fort longtemps, on égorgeait à vif. Depuis, et c’est tant mieux, les méthodes sont devenues moins barbares.

La patronne, la maîtresse de maison était tchi avec sa péle à djetter le sang. Dans le find de la péle, elle avait mis du vinaigre. Alors, le sang commençait à couler et quand la poêle était pleine, la patronne versait le contenu dans un seille ou un pordegné sans perdre de temps en ayant soin pendant l’opération d’obturer la plaie avec sa main ou son poing. De l’autre main, elle brassait le sang du seau pour éviter les caillots et ce, toutes manches retroussées. On récoltait environ 4 ou 5 litres de sang. Quand il prenait une teinte plus vive, on disait : "c’est la fin". En effet, ce sang arrivait directement du cœur. C’était le dernier souffle. Et pour terminer l’opération, on le filtrait au travers d’une toile de chanvre pour enlever la caillote. On recouvrait alors la bête de paille propre et on craquait une allumette. C’était l’épilation. Il se dégageait une odeur âcre de "cochon grillé", normal, n’est-ce pas ?

Lorsqu’il était grillé des deux côtés, enfin quand le poil était grillé, on le balayait avec un balai de jnat, un balai rustique fabriqué avec du genêt et ô ! Combien pratique dans moult occasions. Par parenthèses, il en existait avec un manche long et d’autres plus petits servant de balayettes. C’était un bonheur d’utiliser ces ustensiles d’un autre temps, fabriqués par le grand-père et qui servaient de cadeaux de Noël ou de Nouvel An….

 

Pardon, je m’égare, c’était un petit moment de nostalgie. Je reviens à mon goret (sauf…).

Plus de poils sur la bête ? Oh que si, ils étaient courts mais assez raides pour indisposer les mangeurs de sauce à la couenne. On lavait le bêtia à grande eau et on le raclait avec des boîtes de sardines vides préalablement percées de trous à l’aide de pointes. Alors on l’installait, tête en bas, accroché par les pattes de derrière sur une échelle posée contre un mur. On coupait la tête qu’on plaçait immédiatement dans un seau d’eau. Puis la gorgère, c’est à dire le cou jusqu’aux épaules. Souvent les hommes se dévouaient pour laver la tête afin de fermojer les oreilles, les couper et réserver la cervelle pour les enfants. La gorgère était réservée, elle aussi. On allait s’en occuper très vite. On coupait la peau du ventre de bas en haut et de gros bras tenaient fermement en dessous un melou pour recueillir toute cette tripaille ; le melou, sorte de manne fabriquée avec de la bourdaine et du châtaignier le soir à la veillée, était au départ destiné à faire meler, sécher les fruits. Puis, très pratique qu’il était, a servi à mille usages.

On recouvrait le melou de torchons blancs de chanvre coupés et ourlés dans daus vieux linceux qu’aviont dépeu longtemps été changés d’eurailles.

Qu’est-ce à dire ? Les linceux ainsi nommés étaient les draps de lit, qui étaient, il y a fort longtemps, confectionnés avec du chanvre planté, récolté, roui (dans la mare) et tissé dans mon village. Attention ! Malgré mon âge fort avancé, je n’ai pas connu tout à fait cette époque. Quand ces linceux étaient par trop élimés, voire même usés dans le milieu, on les coupait en deux. On détervirait les deux moitiés dont on rapprochait les bords et on les cousait. Les deux parties usées se retrouvaient alors à l’extérieur et devenaient les lisières. Et ma foi, ça servait encore un bon bout de temps supplémentaire. Mais, s’il y avait un mort dans la maison, on utilisait un linceu nu (c’est à dire neuf) : alors le linceu devenait linceul, sans vous offenser, Messieurs Dames. Pardon encore si je m’égare, je suis sujette il est vrai à d’intempestives digressions qui me ramènent à des temps anciens, pour ne pas dire immémoriaux pour certains.

 

La tripaille

 

Or donc, on recueille la tripaille dans le melou, l’intestin grêle et le gros intestin qu’on va bientôt laver. Et puis le foie nègre, le foie bianc (les poumons), le cœur, prestement suspendus à un gros clou pour pouvoir s’égoutter. On a eu soin de placer en dessous un vaissâ, terme générique pour désigner tout à la fois une écuelle, un bol, une assiette, un saladier etc…etc…Ou bien tout simplement un journal quand on en avait un, à seule fin de régaler un peu le chat de la maison.

L’intestin grêle, les tripes qui mesuraient environ 7 mètres étaient retournées pour en retirer les excréments. On les lavait à grande eau dans une basse, barrique coupée en deux qui servait ainsi de récipient. Et si on compte bien, une barrique, ça faisait deux basses qui servaient pour laver tout, tout et encore tout : le linge, le corps en cas d’urgence médicale ou de grande fête, mais aussi pour les dégraissages bien plus prosaïques tels ceux relatifs à la boudinerie.

 

Je vais essayer de ne pas m’écarter du sujet. Quand les tripes étaient bien rincées, on les grattait avec une cuillère à soupe pour ne point les gâter ou les percer.

Après avoir ébouillanté la gorgère pour la raffermir, on la passait au moulin à viande, sauf qu’autrefois avant toutes tchés inventiens, elle était coupée à la main. C’est pourquoi on trouvait daus cheveilles dans les boudins, à savoir de gros cubes de gras appréciés par les plus anciens d’entre nous, surtout au moment des "restrictions". Mais maintenant tout est mouliné. Tant mieux pour beaucoup… hélas pour d’autres.

Cette viande hachée au couteau ou moulinée était mélangée aux oignons coupés, avec du sel et "4 épices Rabelais" dans une chaudière posée sur un tréped, avec en dessous un feu de cheminée pas trop vaillant. Ce mélange devait cuire très doucement. A la fin et hors du feu, on ajoutait le sang en brassant.

On prélevait alors une ou deux cuillères à soupe de ce nectar pour le faire fricasser dans une poêle ; et si l’on en était digne, on dégustait pour donner un avis…autorisé bien sûr. On disait "pas assez de sel, trop peu d’épices"- gare à n’avoir pas eu la main trop lourde, étant entendu qu’il vaut mieux en rajouter puisqu’en retirer est impossible.

 

Me suis-je trompée ? Non, je pense. On en est aux boudins. Les tripes bien lavées attendent sagement dans un bol, un bout lié fortement et l’autre à cheval sur le bord, avec au fond un peu d’eau.

Tout le minde avait chez sâ une ouillette à boudins, un entonnoir spécial gros diamètre. Avec une louche, on prélevait le mélange et on le faisait couler dans la tripe. Un ou une aide liait les boudins en ménageant toujours un petit espace entre deux à seule fin de ne pas les voir éclater à la cuisson. Il y avait toujours aussi une épingle de nourrice qui servait à percer quand se formaient les bulles d’air : les gamins rivalisaient entre eux pour ce geste "important."

Si un homme, jeune ou moins jeune passait par-là, on l’interpellait et on lui lançait : "Eh bé, et t’au que tu vins douner la mesure ?" avec bien entendu un petit clin d’œil complice mais discret. Les femmes, zelles rigoliont pas et faisaient la meûgne, la moue, en renvoyant la marmaille se faire voir ailleurs. Elles étaient pudiques, de façon générale. Voilà nos boudins liés et aussitôt plongés dans une chaudière d’eau frémissante. On les faisait cuire, c’était assez rapide. Pour savoir si l’opération était terminée, on en piquait un et dès que le sang ne giclait plus rouge, c’était terminé. Attention, si un gars allait pisser derrière la cheminée à ce moment là, ça les faisait péter (les boudins) disait-on alors.

On les disposait en rond dans un melou recouvert de torchons propres,

puis on passait dessus de la couenne de gorgère pour les faire briller. Mais l’eau de cuisson n’était surtout pas jetée : elle était distribuée à tous les habitants du village qui, le soir, venaient remplir leurs casseroles, c’était la "soupe aux boudins" pas toujours digeste mais ça passait bien puisque c’était bon.

Parfois, c’était les gosses de la maison qui distribuaient ce précieux jus tout chaud et souvent ils trouvaient les gens assis à leur table, et devant eux une assiette dans laquelle ils avaient d’avance coupé du pain.

 

La découpe

 

Eh bien ! Nous voilà au vendredi matin. Tout le monde a bien dormi la nuit dernière (la journée du jeudi ayant été assez fatigante). Bien sûr, nous n’oublions pas notre goret (sauf votre respect) toujours pendu per les peds dans un’endret bin frat et l’est bin patient bounes gens ! L’est, si vous vous en souvenez, copé per devant o faut avoure le fendre per dâre. Le patron de la maisin, armé d’un serpâ, et d’une mailloche coupe le long de la colonne vertébrale. Voilà donc deux moitiés, qui sont dépendues et là on coupe, on taille, on tranche.

On taillait les rôtis dans les côtes : ainsi quatre côtes dans toute leur longueur faisaient un belle part, par exemple.

Dans l’épaule, on prélevait la viande pour faire les pâtés de viande, par opposition au pâté de foie fait comme son nom l’indique avec du foie et aussi du lard. La viande était passée au moulin à viande, assaisonnée et mise dans les pâtissières, les terrines, avec dessus une feuille de laurier. Avec les tcheusses, on pouvait faire des jambons mais très souvent aussi de savoureuses sauces à la rouelle qu’on prononçait ruelle, mijotées dans du vin rouge avec des oignons et peut-être des champignons, n’hésitez surtout pas à nous envoyer vos recettes. Merci.

 

La ventrinche, appelée aussi ventrêche, partie de la poitrine et sous le ventre, était utilisée pour faire les gratins. Autrefois, les gratins étaient coupés à la main : on retrouvait les morceaux. Puis le modernisme est passé par là. Il y a eu prolifération des moulins à viande qu’au zebernont tout, c’est écrasé. Un peu comme la julienne de légumes comparée au potage mixé. On préfère l’une ou l’autre manière…Pardjienne !!! Et comme on revient parfois à la méthode ancienne pour retrouver les goûts de jeunesse, on découvre un jour un charcutier du marché de Rouillé qui vous vendra des"grosses rillettes" et des "rillettes fines"- publicité gratuite, je vous l’assure.

Ces morceaux de ventrinche coupés ou hachés sont cuits très très doucement dans la chaudère sur le tréped. Et gare au garnement qui, s’ennuyant à brasser, rajoute inconsidérément une poignée de fagot ou deux ou trois brandins parce qu’il n’a pas trop chaud. On est tout de suite repéré : le mélange prind au find et les gratins periont avère un goût de rumi, de brûlé. Figurez-vous que je vous en parle en connaissance de cause.

Les pâtés dans les pâtissières, les rôtis dans leurs plats de terre étaient cuits dans le grand four à pain.

Ça sentait furieusement bon et pas seulement à quelques mètres. Une fois cuits, les gratins étaient prélevés avec un friquet, une écumoire, et versés dans les pots de cré. On les recouvrait de la graisse restante qui les protégeait et les faisait se conserver…un certain temps. De toute façon, on voyait quand o yavait dau verri, du moisi. On retirait tchau verri et on mangeait le reste. Sans doute inconsciemment bien sûr, connaissions-nous la pénicilline avant sa découverte. J’en veux pour preuve l’avidité avec laquelle nous dégustions et appréciions les fromages complètement moisis : je n’ai jamais vu dans ce temps-là quelqu’un en retirer la croûte. Etonnant non ?

La sâce à la pire et la sâce à la couenne : la première nommée était confectionnée avec la rate, les rognons, un peu de foie et du vin blanc, sans oublier l’assaisonnement, le tout dans un plat de terre recouvert d’un morçâ de toelle dau ventre, crépine. Elle était cuite avec les pâtés, les rôtis dans le four à pain. Quant à la seconde, c’était de la couenne hachée quand elle était presque cuite, du foie blanc, du vin rouge, sel, poivre etc…

On la cuisait dans le coin de la cheminée, tout doux, tout doux, pendant plusieurs heures ou sur un potager quand on en avait un dans la maison. Ecrivez-nous pour nous dire si vous confondez ce potager-là avec votre jardin.

Pour finir gaiement la journée, et toutes papilles en éveil, on enfournait les pâtés aux poumes, chaussons grands comme des roues de charrette, et les traditionnelles grimolles sur les feuilles de chou. "Au fait, la grimolle, vous la préférez avec ou sans pommes ? Donnez-nous vos recettes. Merci. "

 

Et le salé ? Voilà-t-y pas que j’ai oublié le salé. Oh ma !…Il y a ma foi pas mal de temps que je n’ai pas utilisé cette interjection, qui veut en dire long, n’est-ce pas ? Surtout quand on la fait suivre de fautau : "Oh ma faut tau", c’est intraduisible mais c’était tout un programme, c’était catastrophique.

…Mais j’arrête là, j’ai décidément la langue trop bien pendue, ou trop d’encre dans mon stylo. Revenons au salé : on disposait des morceaux de jarret et de poitrine dans les salous ; la viande se gardait dans la saumure pendant plus ou moins un an. Plus c’était gras, plus on appréciait à l’époque. Quand vous pensez que de nos jours on doit aller au marché à Lezay pour trouver du salé gras ! Oh ma, faut tau !…

On faisait aussi l’andouille, mais peut-être l’ai-je déjà écrit précédemment avec le bonnet, l’estomac rempli du gros intestin quelques mois, parfois un an après la tuerie parce qu’on avait beaucoup de viande sous la main et que le sel conserve bien.

 

Invités aux boudins

 

Le dimanche suivant, c’était le repas de goret, appelé plus communément les boudins. Ainsi on était invité aux boudins chez Untel. Etaient invités, outre la famille, les amis et certains voisins. Vous ne sauriez deviner ce qu’on y mangeait ! Gagné ! C’était du goret (sauf votre respect…)

Menu type de boudins :

- boudins en entrée

- sauce à la ruelle

- rôti cuit dans les côtes

- mojettes + salade frisée et aillée avec un croûton.

- fromage de chèvre

- pâté aux poumes

A l’époque, on ne sortait jamais de ce repas sans protéines, ni et encore moins l’estomac creux.

 

Les échanges de viande : pas de réfrigérateur, encore moins de congélateur. De tout temps, le manque de moyens stimule l’imagination. Ainsi, aux personnes qui ne pouvaient pas "rendre", on donnait toujours et sans retour la soupe et quelques boudins ; en revanche, aux autres qui allaient tuer quelques semaines plus tard, on donnait un rôti, une ruelle, étant entendu qu’on récupérerait ces morceaux-là le moment venu. C’était très sympa comme on dirait de nos jours.

Dans le cochon, tout est bon. C’est vrai, rendez-vous compte, on a déjà coupé, découpé nombre de morceaux à manger rapidement ou bien conservés dans la graisse ou la saumure pour plus tard.

Au moment de l’épilation, on avait retiré les neillins, les ongles, d’un mouvement de rotation sur le bout des pieds et on les avait garochés pour amuser les poules. Mais c’est tout. Que reste-t-il donc ? La couette – Ah ! la couette en tire-bouchon ou non. Mes voisines, toutes deux prénommées Odette m’ont raconté d’amusantes anecdotes : jeune fille, Odette Cousseau, appelée alors Odette Eprinchard possédait une bicyclette munie de sacoches. Quelle ne fut pas sa surprise un jour de s’apercevoir que l’une d’elles avait été dégueniaïe, déchirée sauvagement ; un plaisantin avait déposé quelques temps auparavant une couette de goret qui avait délicieusement faisandé et avait attiré…les chats.

 

Odette David, elle, divisait la couette en deux parties :

- Le gros bout qui tenait à un morceau de l’arrière-train était placé dans le salou, au beau milieu ; de sorte que lorsque l’on prélevait les morceaux de salé, on savait exactement quand on arrivait à la moitié.

- Le plus petit bout de la couette était réservé pour rigoler un peu. Un jour, Odette l’avait placé dans un boudin bien repéré, qu’elle avait destiné à une personne comprenant la plaisanterie et invitée aux boudins - sauf qu’une fois, elle a perdu la trace du boudin en question. Que faire ? Chaque fois qu’elle donnait quelques boudins de cette tuerie-là à des amis, elle devait raconter sa mésaventure. Et tout le monde riait. Ce n’était pas méchant, jamais.

 

La bousingue, la vessie.

 

On l’emplissait d’eau et on la faisait sécher dans la cheminée. Plus tard, elle servait, remplie d’eau froide, à soulager les maux de tête ou de ventre, lors de crise d’appendicite par exemple. Elle servait aussi à amuser les drôles qui n’avaient pas à l’époque de ballons de baudruche.

Le fiel, la vésicule biliaire avait, disait-on, la particularité d’extirper les épines. Il arrivait effectivement que d’aucuns se faisaient méchamment entamer la piâ, en fagotant, par exemple. On avait peur du tétanos. Alors, pendu à un clou, le remède veillait.

Si vous pouvez témoigner des vertus du fiel, merci de nous le dire.

 

Sans doute ai-je oublié des tas de choses que vous, lectrices et lecteurs avez engrangées.

Je le redis : écrivez-nous et faites-nous part de vos souvenirs pour parler de tchau sacré goret ( sauf votre respect…)

 

 

 

 

Merci à mes voisins André Sapin, Odette David, Roger David, Odette Cousseau qui ont eu la gentillesse d’évoquer leurs souvenirs pour étayer les miens.

 

 

Devinette :

Dormi-Dormail était couché sous Pendi-Pendail. Pendi-Pendail a cheu su Dormi - Dormail. Dormi-Dormail a minjhé Pendi-Pendail…comme de jhuste.

Tchi qu’ol est ?

 

Réponse :

Et bé ol est core li (sauf votre respect) qu’est couché sous un châgne :

un’ayan a cheu su son nâ…et le l’a minjhé, comme de jhuste.

(Un porc était couché sous un chêne : un gland est tombé sur son nez et il l’a mangé – comme de bien entendu.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 Légendes des photos

1- Roger fend le goret tout dau lin, avec sa mailloche et son serpâ.

2- Le goret (sauf votre respect) a été éviscéré : Yvette et Odette trient les boyaux.

3- Raymonde mouline la viande à pâté

4- Odette goûte un p’tit de la mixture qu’al a fait fricasser : elle a le sourire : o s’ra pas chéti, desârd !

5- André atchuche la gamelle d’ognins que lui tend Roger per les verser dans la chaudère

6- L’ouillette à boudin dans la main gâche, Odette doune la boune mesure avec son det, tandis qu’Annick nouque.


La vie municipale voici 200 ans

 

2. FRANÇOIS ANDRAULT,

l’autre notaire, maire en 1791 et 1792

 

Le second maire de Saint-Sauvant, en 1791, est François Andrault, l’autre notaire. Il succède à Belleroche, présenté dans la Boulite n° 2. Il a été maire en 1791 et 1792, mais on n’a retrouvé aucune pièce officielle faisant état de son élection ni de la fin de son mandat. A l’époque, les maires sont renouvelés tous les deux ans.

 

D’une famille de notaires, hommes de confiance des seigneurs de Saint-Sauvant

 

Notaire de Saint-Sauvant de 1774 à l’An 5 (1797)1, Me François Andrault apparaît, dans les registres paroissiaux de l’Ancien régime, à la fois comme notaire et comme procureur fiscal des puissants seigneurs de Saint-Sauvant. Il est né vers 1726. Il se marie avant 1758 avec Marie-Magdeleine Moinot. Le couple aura cinq enfants, nés de 1758 à 1768, tous baptisés à la paroisse catholique de Saint-Sauvant. Le dernier, Jacques, baptisé le 28 octobre 1768, deviendra prêtre.

François Andrault est fils et petit-fils de notaires prénommés également François. Le premier de la lignée, connu à Saint-Sauvant, est donc le grand-père du maire de la Révolution. Ce François Andrault I est marié à Magdeleine Boutineau. Il apparaît, dans les registres paroissiaux de Saint-Sauvant, d’abord comme notaire de la châtellenie de Celle-l’Evescault, par deux fois, en 1703 et 1708.

Le couple doit habiter Saint-Sauvant où sont baptisés six de leurs huit enfants, de 1702 à 1719. Leurs deux aînés ont dû naître ailleurs. En 1710, est cité « messire François Andrault, notaire et hôtelier de ce bourg » [de Saint-Sauvant].

 

François Andrault II, fils du précédent, se marie à Saint-Sauvant, le 19 juin 1724, avec Magdeleine Eprinchard. Ils auront dix enfants, dont trois ne sont pas baptisés à Saint-Sauvant, ce qui est le cas de François III, né vers 1726, le futur maire. François II, syndic en 1731, sera enterré dans la nef de l’église le 10 janvier 1774 à 73 ans.

Ces François Andrault successifs, grand-père, père et petits-fils, seront notaires à Saint-Sauvant tout au long du siècle ou presque, de 1703 à l’an 2. Ils sont cités dans les actes paroissiaux comme notaire de la châtellenie de Bréjeuil, en 1711, procureur fiscal, notaire et greffier de la terre de Saint-Sauvant, en 1724, notaire de la seigneurie de Saint-Sauvant, Bréjeuil et la Roche Ruffin, en 1774, et, entre temps, assez souvent notaire royal. Ce qui signifie qu’ils étaient attachés comme notaires au seigneur principal de Saint-Sauvant, Bréjeuil, la Roche-Ruffin, dont ils défendaient également les intérêts fiscaux.

Le premier est dit hôtelier, en 1710, dans le registre paroissial, et qualifié de cabaretier dans les rôles de la taille de 1710 à 1720. C’est un petit contribuable de 22 sols en 1710, mais dont la situation s’améliore vite pour payer 14 livres en 1719. Son ascension sociale se confirme en 1720, où il prend la ferme [générale] du prieuré, et, en 1721, où il ajoute à ses revenus ceux de la ferme [générale] du marquis de Courcillon, le seigneur de Saint-Sauvant, la Roche Ruffin et Bréjeuil. Il paie alors une taille importante de 70 livres 13 sols 2.

Alors, du grand-père au petit-fils, un notaire Andrault sera toujours, pendant 70 ans, sans doute l’homme le plus influent de la commune, après le seigneur toujours absent, dont il est le représentant.

Pas étonnant que le petit-fils soit devenu maire en 1791. A la fin de l’Ancien régime, il fût peut-être syndic, car on trouve plusieurs fois un François Andrault dans cette fonction, au 18e siècle : son père, François II, en 17313, et sans doute le même en 17544

 

Son mandat de maire

Des documents épars nous indiquent avec certitude que François Andrault était maire au moins du 23 janvier 1791 au 14 octobre 1792. En fait, il a dû exercer la fonction tout au long de ces deux années.

Il est maire dès le début de 1791, à 65 ans. Le 23 janvier, il reçoit la prestation de serment du curé François Cherbonneau.5 Le 20 mars, il choisit, avec la municipalité, François Motillon, maréchal dans le bourg, comme percepteur de la taxe foncière et personnelle. Le 21 août, il choisit le même Motillon comme receveur des autres impositions de l’année.6

Le 8 mars 1792, il signe un certificat de « bonne vie et mœurs » en faveur de Jacques Laroze, 22 ans, qui vient d’obtenir son congé de soldat provincial, « pour entrer dans les Gens d’armes ». 7 Le 14 octobre, il est toujours maire. Il signe, ce jour-là, un état de la situation des subsistances dans la commune (grains et besoins de la population). 8

 

Son équipe municipale

Dans les documents ci-dessus et quelques autres, plusieurs membres de l’équipe municipale sont cités : Louis Souché, procureur ; François Barré, Daniel Bruneteau, François Bruneteau, Jean Douhet, Charles Gautié, Nivelle, Jean Perrin, officiers municipaux ; Jacques Augereau, Bernard, Bouguoin, Maurice Dupré, notables9.

On voit apparaître le premier greffier de la municipalité, François Suire, le maître d’école, 22 ans10, le 23 janvier 1791, jour de la prestation de serment du curé Cherbonneau.

G.P.


Chansons saint-sauvantaises

 

 

SUZETTE VEUDRAIT SE MARIER

Notre troisième chanson saint-sauvantaise, « Conseils aux Feuilles à marier », est comme les précédentes, une chanson de la première moitié du 20e siècle. Elle fut retrouvée par M. et Mme Arsicault, lors du lancement du groupe folklorique, « les Gueurlets Virounants ».

Son thème est celui, très fréquent en chanson, d’une jeune fille qui cherche un mari. Un thème chanté en patois très approximatif, mais sans doute assez usité alors. Il y manque un peu de rigueur dans son emploi ou non pour les mêmes termes, d’un couplet ou d’un refrain à l’autre.

Suzette voudrait se marier. Elle ne sort pas seule, et se fait aider d’une amie ou d’une parente, un jour de fête à Saint-Sauvant, pour lier contact avec des prétendants. Le premier p’tit gars est promis. Le deuxième, « commandant » de la Sportive, est déjà marié et père d’un drôle qui braille. Enfin, en dansant l’avant-deux, elle trouve un amoureux qui remarque sa chevelure frisaille et sa mine émouriodaille (sa mine réjouie et malicieuse). Ah ! la danse et le coup de foudre !

 

 

3. Conseils aux Feuilles à Marier

 

Air : LA TONKINOISE

 

 

 

Premier Coubiet

Sachant que faire

Pour distraire

Suzett’qui veudrait s’marier

A Saint-S’vant qui disit o s’doune

Un’ fête allons-y ma boune

Pis en route

Y’a pas d’doute

Trouv’rons bin peur t’épouser

Un gars pas trop mal fichu

Et qu’aura tout pien d’éthiu

 

Arfain

Allons vint don ma Suzette

Jolie fifi, jolie fifi, jolie fillette

Avec ta chevelure frisaille

Et ta mine émouriodaille

Fais [dan] pas toun’ haïssab’ye

Tâche d’êt’ bibi, tâche d’êt’ bibi

tâche d’êt’ bigeab’ye

A Saint-S’vant s’tu veux trouver

Un jeune homme peur te marier

 

Deuxième Coubiet

Dévalantes

Bin contentes

Y arrivan dans n’in grand pré

Ine musique sans pareille

Vint chatouiller nos oreilles

Avenante

Et galante

A thiau qui quiarivétait ?

Y d’sit sans trop d’embarras

Veux-tu t’marier mon p’tit gars

 

Arfrain

Allons vint don ma Suzette

Jolie fifi, jolie fifi, jolie fillette

R’garde sa chevelure frisaille

Et sa mine émouriodaille

Et pis qu’alle est bin aimab’ye

Alle est bibi, alle est bibi,

alle est bigeab’ye

Yo regret’ bin que le me dissit

Mais olé qui s’est promis

 

 

 

 

Troisième Coubiet

V’la qu’o soune

Quo quiéroune

Qu’o d’val daus gars tout fringants

O l’était la Sportive

Qui v’nait au son d’la musique

Hésitante

Et tremblante

Y disit au commandant

Disez dan si vous veuliez

Y peurait vous faire marier

Arfrain

Admirez dan ma Suzette

Jolie fifi, jolie fifi, jolie fillette

Sa belle chev’lure frisaille

Et sa mine émouriodaille

Et pis qu’alle est bin aimab’ye

Alle est bibi, alle est bibi,

alle est bigeab’ye

Y s’est marié que l’me disit

Mon gosse braille pas lin d’ytyi

 

Quatrième Coubiet

V’la qu’o danse

Yon mé d’chance

De trouver un amoureux

Au même moument o s’ameune

In gars qu’avait l’air tout jeune

Rougissante

Bin contente

Suzette dansit l’avant-deux

Pisquand ? O s’éyit finit

Vl’la c’que thiau gars l’y disit

Arfrain

Marian nous dan ma Suzette

Jolie fifi, jolie fifi, jolie fillette

Y’aime ta chev’lure frisaille

Et ta mine émouriodaille

Ecoutez tout’ les Rosette

Tout’ les Fanchon, tout’ les Suzon

tout’ les fillettes

Peur trouver à vous marier

A Saint- S’vant faut que vous v’nez

 

 


Coutumes

LES SOBRIQUETS OU SURNOMS

 

A toutes les époques, dans nos villages, les gens se voyaient attribuer des surnoms. Saint-Sauvant n’échappe pas à cette vieille coutume encore usitée aujourd’hui.

Voici quelques exemples de cette pratique. Dans la liste des 521 chefs de « feux » imposés à la taille due au roi en 1789, se trouvent 78 surnoms. Il y avait sans doute beaucoup plus de gens affublés de surnoms, mais ceux-là, au moins, permettaient de distinguer les homonymes.

Une seconde liste de seulement 8 surnoms montre comment les sobriquets permettaient de s’y retrouver parmi les 36 Bruneteau figurant dans les matrices cadastrales de 1836 .

Et ça continue. Ces dernières années encore, les Bruneteau portaient divers surnoms.

 

§ Dans le rôle de la taille de 1789.

 

Quartier des Bouiges

Louis BARANGER, dit Radigon

Jean BRUNETEAU, dit Mérou

Jean FRAPPIER, dit Legros

Jean GIRARD, dit Vignolle

Louis GIRARD, dit Nombrot

Les héritiers de Pierre GIRARD dit Chembert..

La veuve de Pierre GIRARD, dit Vignolle.

Pierre MENNETEAU, dit Grand Piau.

Jacques PORTRON, dit Leroy

La veuve TEXIER, dit La Culotte.

 

Le bourg

Louis BARAULT, dit Bistien.

François BONNIFET,dit Bertault

Jacques BOURON, dit Mothé.

Pierre BOURON, dit Turbine.

François BRUNETEAU, dit Lamy.

Jean CHASSAC, dit Bertault.

Jean FERRE (Ferré), dit Vadroit.

Jean GOURBAUD, dit Penade. .

Jean MARCHAND, dit Guillée.

Pierre MARCHAND, dit Guigue.

La veuve de Pierre MARCHAND, dit le Cail..

François MIGAULT, dit Cadet.

Pierre NIVELLE, dit Joly Bois.

La veuve de Pierre NIVELLE, dit Misère.

Jacques PHILIPPON, dit Besson.

François ROULLEAU, dit Moret.

Etienne SUSSET, dit Lagréta.

Quartier de l’Eterpe

Jean BARAUD, dit Petit Oueil.

Le nommé COURSEL, dit la Ramée

Jean PORTRON, dit Gentille

Louis NIVELLE, dit le Cail.

Quartier de Faljoie

Pierre BAROT, dit Jolac.

BAU, dit Boudault.

Charles GIRARD, dit Rabot

François TERRASON, dit Bonfort

La veuve de François TERRASSON, dit Bonfort

Pierre TANNEAU, dit Le Bossu.

 

Quartier de la Guérinière

Pierre BELLIVIER, dit Césard.

Jacques BRUNET, dit Le Bossu.

Le nommé BRUNET, dit Le Fier.

Jean PHILIPPONNEAU, dit Pic Roc.

Jacques PORTRON, dit Moret.

Quartier de la Litière

Jacques BRUNET, dit Guenuchon Pierre BRUNETEAU, dit Latorche.

Le nommé BRUNETEAU, dit Latorche

Jacques GAUTIER, dit Panassier.

Jean GUYOT, dit Chempagne

Les héritiers de Louis PAIRON, dit Bertault.

Jacques ROULLEAU, dit Bagnau.

Quartier de Longe

Pierre AMIAULT dit la Charrette

Pierre BARAULT, dit Lanique.

François BERNARD, dit Le Beau.

Jacques BOUTINEAU dit Drillon

Jacques BRUNET, dit Cayenne.

Jean BRUNET, dit Cadue.

François BRUNETEAU, dit Calleau.

Jean BRUNETEAU, dit Dufour

Pierre BRUNETEAU, dit Dufour.

Jean FEUVRIER, dit Thoret

Jacques GAUTIER, dit Panassier.

Jean GAUTIER, dit Panassier

Pierre GEMMERON, dit Roullet

Pierre MENNETEAU, dit Le Consonné.

Louis NIVELLE, dit Le Mitronné

Pierre NIVELLE, dit Lemercier.

François PORTRON, dit Merou

Jean ROYER, dit Le Boc.

TEXIER, dit Ferluchet..

 

Quartier de la Roche Rimbault

CHOPIN, dit Marzellon.

Jean MOTILLON, dit Fignolle.

Jean PROUST, dit Le Terrou.

La veuve de Pierre TANNEAU, dit Cadet

Pierre TERRASSON, dit Depernon

 

Dans le cadastre de 1836 (l’exemple des BRUNETEAU)

François, dit Roquet, le bourg.

Jean, dit Calleau, Longe.

Jean, dit Moitureau, la Simalière.

Jean, dit Jean Madame, le Bois de Sairé

Louis, dit Nièce, le bourg

Veuve Pierre, dit Le Gros, la Guérinière.

 

Veuve Pierre, dit Pierrille, la Simalière.

 

 

Encore des BRUNETEAU à sobriquets ces dernières années

 

Il y a une vingtaine d’années, Pierre BRUNETEAU, du bourg, évoquait trois familles de BRUNETEAU à surnoms : les BRUNETEAU Rome ou Rhum ; les BRUNETEAU Mortura ; et les BRUNETEAU Ratis.

 

On le voit : tous ces surnoms sont pleins de sens, encore explicables pour beaucoup d’entre eux. Ils traduisent la manière dont les personnages surnommés étaient vus de leur entourage, parfois avec tendresse, parfois avec rudesse, mais souvent avec esprit.

 

 

DITES-NOUS LES SURNOMS que vous connaissez.

Si vous en savez l’origine, indiquez-nous là. Merci.

 


Souvenirs

 

FIN D’ÉTÉ

 

Arlette DOMINEAU

 

Depuis quelques jours déjà, la chaleur est moins fatigante et les activités de l’été touchent à leur fin, comme si elles s’étaient usées sous le soleil et la poussière.

Même ma robe légère accuse la fatigue des beaux jours trop longs ; les espadrilles éculées pâlissent et ne supportent plus que nos pieds aient grandi dans les chaumes et les chemins creux, derrière les troupeaux.

Les jeux aussi ont perdu la saveur de l’été. La routine de nos occupations nous lasse vraiment : le rythme n’y est plus. Il est temps que la pluie revienne et que "l’école nous occupe" comme disent les mamans !

C’est avec un sentiment confus de nostalgie, de plaisir et même une certaine impatience, que nous passons quelques heures à retrouver cahiers et livres pour reprendre contact avec ces outils que nous avons délaissés quelques temps.

Tout d’abord, il faut faire le bilan de tout ce qui peut encore servir : tailler les crayons, user les gommes, trier les feuilles utilisables des cahiers de brouillon, vérifier que la plume d’acier ne soit pas rouillée sous l’encre violette séchée ; recouvrir les livres de lecture et de morale que l’on utilisera encore cette année. Le contact du papier, l’odeur de l’encre et des mines de crayon, ravivent cet appétit de retrouver le plaisir de lire.

Le sac de carton bouilli n’a pas encore trop mauvaise allure et, recousu, encaustiqué, il pourrait faire la rentrée. Mais quels livres et combien de cahiers trop neufs aurons-nous à mettre dans ce cartable déformé par tant de problèmes et dictées accumulées ?…

Ce qui nous soucie probablement plus que tout, ce sont les retrouvailles avec les camarades : comment allons-nous nous entendre cette année, nous organiser ? Quels seront nos voisins de table ? Pourrons-nous avoir l’espoir de " loucher " sur leurs cahiers ou de prendre de bonnes parties de fou-rire ensemble ?…

L’inconnu !!! Bien sûr, nous nous connaissons déjà depuis plusieurs années, mais les vacances auront-elles terni notre amitié.


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Les mots de la grille sont écrits en français

L’utilisation du dictionnaire est permise.

De gâche à drète

I - Aut’foués, ol était une inventien per garocher bin lin…(et voui, o s’a teurjhou étripé dépeus Caïn) - un lycée voure qu’on apprint aussi bin la tchusine que la mécanique. II - L’est sûr : on peut quinter su li. - ‘‘Baie du Japon’’ comme le disont dans tous les mots croisés. - corset moderne bin sâré et qui peut faire crère qu’on est bintout comme un fil de fer. III - Voure que daus chins et daus chats att’nont un maître. - dau pain qu’est comme tcheu est pas bianc. - oumiâs (per tchés qui restont et qu’avont pas eu la graphiose). IV - Chambrère. - un’endret qui sentira par le renfeurmis. V - Une grande, grande, grande période de temps. - en Angleterre, ol est une ville où qu’on s’occupe de la laine. - le souleil en doune daus A et daus B. Mais la faculté étou. VI - Etre teurjhou à la même piace. - tchés qui demeuront à Moscou. VII - Aburingue. - tchau qui cret en être un dau volant, est pas à l’abric de burquer. - souventes foués, on aime meux le mot ‘‘gain’’ que tchau mot (surtout au Casino - per tchés qui-y-allont). VIII - Le chrome - mit un bin cop de crayin per qu’on en parle pu. - un soldat américain déterviré. IX - Agola (surtout les palisses) - un bêtia qui marche su le bout dau det en est un. X - Tchau qu’est d’même est menése : le va pertout sans avouère pou.- nétchues. XI - Ol est nouviâ : on minte dessus, on pédale, on va pertout même si ol est racossou. - un soldat américain, mais à l’endret tchau cop. - tout pien pu modernes que daus draisiennes. XII - Les parisiens marchont dans tchelles daus chins et le sont pas contents pasque le ripont et le se cassont la goule et même les ous. - une endret voure qu’un gars et un taureau vont s’écharogner. - XIII - Aimaïe, adoraïe…et core mé qu’tcheu. - le souleil égyptien.- bessounes qu’avont la forme de vermines.

 

De hât en bas

1 - A se vendont souvent en batterie per faire la tcheusine, mais a se vendont châ z-une étou. - avoure o faut en fournir un per pervouère crocheter de l’ouvrajhe. 2 - O pètera pu souvent chez tchau qu’en a 10 à son compteur électrique que chez tchau qu’en a 30. - balot…daus foués avec dau roujhe. 3 - Grands chapiâs à 3 cornes (pas dans le civil). - pu épâs que le papé, le peut être jaune ou rouge au football. 4 - Couère ou coureil per se renfermer chez sa. 5 - Civelles péchaïes souvent la neut aut’foués - avoure ol est cher comme poivre et même pire que tcheu : mais ol est bin ! - son Père est Brecht (Arnolt de son p’tit nim), et l’a eu au théâtre ‘‘La Résistible Ascension’’. - tout jhuste commoincé à tramer. 6 - Archiner mais pas terjhou chez Renault, Citroën et les âtres. - bin ordraïe. 7 - Tchau ou tchelle qu’est d’même peut minter pertout ou sauter comme un chebrâ. – doubié, ol est comme tcheu qu’on appelle son père. - les trois quarts d’un lac d’Italie. 8 - Une couâte dessous et tcheu per dessus (avec dau duvet d’oie) on était menése, on avait châd sans chauffage l’hiver…et sans allergie. 9 - Ol est ‘‘ma’’. Daus foués o sègue ‘‘alter’’ quind o s’agit de tchau ou tchelle qu’est bin mé qu’un ami per sa. - coutâ, souvent per étriper son prochain. -département de la ville de Toulon. 10 - Osâ pijhassé qui sait pas ce que l’dit. - coulera pas, en parlant de l’eau d’une mare ou d’une gasse. 11 - Une femme qui rougne pasqu’a roujhe pas (il s’agit de ses ongles bien entendu). - affluent de l’Oubangui. 12 - Tchau qu’est d’même est pas core en petrasse : mais o sarait tarzer. - bouts de tripes. 13 - mesure avec une ‘‘romaine’’ ou une ‘‘roberval’’. - core mé dans le find de la goule que les messelés, et o faut souvent les daracher pasqu’a fasont grand mâ.

Solutions des mots croisés

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Les archives de Faljoie

 

DES PARCHEMINS DE SIX SIÈCLES

 

 

Le logis de Faljoie a conservé ses archives dont les plus anciennes sont vieilles de six siècles. Elles ont été classées et inventoriées ces dernières années. Les 27 pages de leur inventaire et les 148 pages de transcription de documents vont être déposées, par l’actuelle propriétaire de Faljoie, Mme Christiane de Villepin, à la fois aux Archives départementales, à Poitiers, et aux Archives municipales, à la mairie de Saint-Sauvant.

Au-delà des archives d’une famille, c’est aussi une partie de l’histoire de Saint-Sauvant qu’elles contiennent. Les archives de Faljoie ont une histoire ancienne et une histoire récente.

 

L’inventaire et la transcription

 

L’histoire récente, d’abord. Ce vieux fonds d’archives vient de livrer l’essentiel de ses secrets. Ceci, depuis l’été 1993, depuis que Mme de Villepin, l’héritière des Bellivier de Prin, propriétaires des lieux depuis deux siècles et demi, me montra une demi-douzaine de liasses – dont quatre de parchemins – et de nombreux papiers épars mélangés d’autres parchemins. Il faut, ici, remercier le maire de l’époque, M. Agénor Millet, à qui Mme de Villepin avait parlé de ses archives et qui, imaginant l’importance du fonds pour l’histoire de Saint-Sauvant et des environs, nous mit en contact.

Dès cette première rencontre, Mme de Villepin, M. Millet et moi, nous prîment la décision d’inventorier le fonds, avant d’envisager la transcription de certains documents. Nous confiâmes l’inventaire des 227 parchemins, datés de 1403 à 1789, à l’écriture plus difficile, à Mlle Claire Neuville, de Saint-Benoit, alors étudiante en histoire médiévale.

En accord avec Mme de Villepin, qui assura l’essentiel des frais d’inventaire et de transcription, je proposais la transcription de 67 documents plus directement liés à l’histoire locale : Saint-Sauvant et environs immédiats. Mlle Neuville commença ce travail et transcrit une grande partie des documents.

Fatiguant des yeux, elle dut abandonner. Un autre étudiant médiéviste, Laurent Vallière, de Poitiers, termina le travail, tout en nous proposant quelques notes supplémentaires d’inventaire.

Pour ma part, je me chargeais des papiers dont quelques-uns, mais très peu, étaient regroupés par un lien de cuir. La plupart étaient épars et notablement mélangés. J’en fis le regroupement lorsque cela était possible, puis l’inventaire, réparti en douze autres liasses, les liasses 6 à 16.

 

Les Bellivier de Prin depuis 1752

 

On ne connaît pas l’histoire ancienne de Faljoie. « L’histoire du château est inconnue jusqu’au XVIIIe siècle. Faljoie a gardé son caractère de maison forte, close et fortifiée. Les deux tours, caractérisées par leurs cannonières très apparentes, peuvent être du XVIIe siècle », écrivait, en 1995, M. Jean-Marc Roger, alors directeur des Archives de la Vienne.

L’histoire ancienne de ce fonds d’archives ne remonte pas aux origines de Faljoie dont on trouve trace en 1248, avec la rente aux chanoines de Notre dame la grande de Poitiers, constituée par Hugues de Faljoie, sur son fief du Teilleau.

L’histoire de ces archives s’identifie à la présence des Bellivier de Prin à Faljoie, depuis deux siècles et demi. Fin 1751 ou début 1752, Jean Robert Louis Bellivier, écuyer, seigneur de Prin (Rom) et Luché (Saint-Sauvant), faisait l’acquisition de la maison et de la seigneurie de Faljoie, près de François de la Broüe de Vareilles, neveu et héritier de la précédente dame de Faljoie : Marguerite de la Broüe. Le baron de la Broüe de Vareilles, criblé de dettes, vendait Faljoie « pour payer le carrossier ». Il devait notamment 500 livres à un carrossier parisien « pour le prix d’une chaise milannoise ».

 

Les familles alliées

 

Curieusement, les archives des Bellivier de Prin ne sont pas les plus anciennes – ne remontant qu’en 1584 – ni les plus nombreuses.

Les plus anciens et les plus nombreux parchemins de Faljoie sont venus par les familles alliées ou par les alliés des alliés. Parmi les ancêtres des Bellivier de Prin – pour l’essentiel des familles poitevines et jusqu’à une famille écossaise – on note quelques familles nobles locales.

C’est la famille Vasselot, les seigneurs d’Annemarie, qui est la plus anciennement présente dans les archives de Faljoie, notamment par la copie, en 1409, du testament de Pierre Vasselot, rédigé le 8 août 1402.

Un siècle et demi plus tard, de1559 à 1598, on découvre les Angely, seigneurs de la Simalière, jusqu’alors inconnus dans l’histoire de ce fief.

Les Dupin qui furent seigneurs de la Guérivière, commune de Vançais, et de Luché sont présents dans ces archives de 1579 à 1628.

Les de Villedon, dont une branche nous est connue au 18e siècle comme celle des seigneurs de Lavault, commune de Vançais, est présente dans ces archives de 1598 à 1722.

Les Lauvergnat, seigneurs de la Grange, à Lusignan, sont très représentés de 1580 à 1833.

Les Gourgeault, seigneurs de Mauprié, à Lusignan, ont laissé quelques traces de 1715 à 1843.

Quant aux quelques documents des Lecomte, seigneurs de Teil, à Rom, c’est à Alix-Marie-Geneviève Le Comte de Teil, mariée le 26 octobre 1863 avec Charles-Henri-Paul Bellivier de Prin, qu’on les doit.

 

Les seigneurs, la seigneurie, le domaine

 

Si ces archives contiennent pour l’essentiel des « papiers de famille » – ceux de cette famille noble et de ses alliés – elles sont riches aussi de toute la vie du domaine propre des seigneurs et de la vie de la seigneurie.

Le domaine fut important : Prin, Luché, Faljoie, la Guérivière – qui étaient autant de petits fiefs – mais aussi des métairies dans chacun de ces fiefs et quelques autres, notamment à Rom, une borderie à la Brousse Motheau, des terres à Chatillon et à Payré.

La seigneurie a laissé quelques traces intéressantes des relations entre les seigneurs et leurs tenanciers, notamment presque toutes les pièces d’un très long procès contre les tenanciers du mas de Longe qui refusaient, à partir de 1756, la rente noble du sixième de tous les fruits de leur travail, et à qui la Révolution finit par donner gain de cause.

 

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Le dernier Bellivier de Prin vivant à Faljoie fut Robert Bellivier de Prin (1865-1946) qui perdit trois garçons en bas âge et laissa son logis à l’une de ses filles, Hélène, devenue Mme Henri Delage.

L’actuelle propriétaire du logis de Faljoie, Mme Christiane de Villepin, a succédé dans les lieux à sa grand’tante, Mme Hélène Delage, sœur de Geneviève Bellivier de Prin, grand’mère de Mme de Villepin.

Guy PUAUD

 

Faljoie, selon une carte postale du début du siècle.

 


Les loups aux 18e et 19e siècles

 

DES PRIMES ET DES BATTUES

 

Jean-Paul Barrot a trouvé l’an dernier, chez sa mère, Mme Simone Barrot, aux Merzelières, une drôle de fourche dont il voulait connaître la fonction. Il s’agit d’une fourche à loups. Voici quelques années, Mme Suzanne Léveillé, à Anne-Marie, montrait une autre fourche à loups. C’est dire qu’à Saint-Sauvant, on a chassé les loups avec ces drôles de fourches. Les archives municipales et départementales ont gardé quelques traces des primes attribuées pour la destruction des loups à la fin du 18e siècle et des battues aux loups au 19e siècle.

 

La fourche à loups à Mme BARROT La fourche à loups à Mme LEVEILLÉ

 

Deux fourches à loups

La fourche à loups de la famille Léveillé se présente avec un manche en bois de 1 m 34 de long. C’est une fourche à deux doigts. L’un, plus long, est une lame de 16 cm de long et de 1,3 cm de large. L’autre est une tige circulaire de 11 mm d’épaisseur, plus courte : 11 cm. Cette fourche à loups a-t-elle appartenu à Daniel Léveillé, l’un des nombreux participants de la battue du 1er avril 1823, dans la forêt de Saint-Sauvant, évoquée plus loin ?

L’autre fourche à loups, celle de Mme Barrot, y ressemble beaucoup. Au bout d’un manche de 1 m, elle se présente aujourd’hui avec deux doigts, mais il semble qu’elle en avait trois à l’origine : une lame centrale de 18,5 cm de long et 2,2 cm de large, et un doigt carré et pointu de 12 cm de long, et un troisième doigt cassé.

 

Des primes à la fin du 18e siècle

Des loups vivaient en forêt de Saint-Sauvant à la fin du 18e siècle. Pendant la Révolution, diverses primes sont attribuées pour « la destruction de ces animaux voraces » en 1797 et 17991.

Le 20 ventôse an 5 (10 mars 1797), les administrateurs de la Vienne annoncent le montant des « secours pour la destruction des loups :

- Pour la tête d’une louve pleine 60 F.

- D’une louve non pleine 50

- D’un loup 40

- D’un louveteau 20

- D’un loup enragé ou qui a déjà attaqué des hommes 150 ».

C’est sur ces bases que, le 6 thermidor (de la même année, semble-t-il, le 24 juillet 1797), est adressé à la municipalité par le département « un mandat de 100 F au profit du citoyen Rivaud, habitant votre canton pour prime à lui accordée en considération de cinq louveteaux qu’il a détruits ».

Deux ans plus tard, le 24 floréal an 7 (14 mai 1799), sans doute le même Louis Rivault, journalier, et Etienne Vincelot, cultivateur, tous les deux de la Chevraise, vont à la maison commune, présenter « quatre louveteaux vivants qu’ils ont pris dans la forêt de St Sauvant quartier des Morins, commune de Sauvant ».

Pour cette prise, ils recevront, le 15 brumaire an 8 (6 novembre 1799), une prime de 80 francs.

Le 5 prairial an 7 (25 mai 1799), le citoyen Jean Coursel, journalier à l’Eterpe, présente à son tour « deux louveteaux vivants qu’il a pris dans la forêt de Sauvant près les Loges ».

 

La battue du 1er avril 1823

On a encore trace de loups, en forêt de Saint-Sauvant, en 1823 et 18802. Un arrêté préfectoral du 8 mars 1823, ordonne « une battue dans les bois et forests dépendant des communes de Cellevescault et de St Sauvant pour y chasser les loups qui y sont réunis ». Le 3 mars, le maire de Celle l’Evescault avait informé le préfet « que les loups font beaucoup de ravages dans la commune et dans celle de St Sauvant » et demandé une battue. Le préfet dit que « les loups se sont considérablement multipliés depuis quelques années » dans ces deux communes ; « qu’ils dévorent les animaux employés à l’agriculture et désolent les cultivateurs » et conclut  : « Il est urgent de les détruire ou dénigrer par des battues ».

 

Près de 200 hommes dont la moitié en armes

La battue sera dirigée par M. Labrousse, lieutenant de louveterie, en accord avec M Poulet, inspecteur des Eaux et Forêts et les deux maires. Ces derniers sont invités à recruter « le plus d’habitants qu’il [leur] sera possible, en raison de la grande étendue de bois à battre ». Ce sera le 1er avril. Rendez-vous « à la pointe du jour chez le sieur Dabirand, brigadier à cheval, au Parc. » C’est le garde forestier. « Quatre gendarmes se trouveront sur les lieux pour veiller au maintien du bon ordre ».

Quarante hommes armés et 47 hommes sans armes sont requis par le maire de Saint-Sauvant, René de Reveau, pour cette battue du 1er avril, mardi de Pâques. Si la participation est aussi forte à Celle l’Evescault, ce sont presque 200 hommes, la moitié armés, la moitié rabatteurs, qui sont appelés à cette opération.

Pour Saint-Sauvant, quelques-uns sont du bourg mais la très grande majorité sont des villages voisins de la forêt. On en compte 8 du Bois de Sairé (Jean Collon, un autre Collon, Jacques et Pierre Cousson, Larcher, François Rivaud, Jacques Souché, Jean Thoreau), 4 du Grand Sairé (Louis Barricaud, le fils Rivaud, Jean Sauzeau, Louis Viault), 3 du Petit Sairé (Bourdeil, Jean Douhet, Jacques Pasquier), 8 d’Anne-Marie (Alleau dit Cantin, Grignon, Daniel Léveillé, Motillon, Peningault, Louis Sauzeau, un autre Sauzeau, Jacques Thoreau), 7 de la Brousse Portron (Amiault dit Naulet, Pierre Bruneteau, Eprinchard, Funé, Guillon dit Brandon, Pierre Pagnault, Jean Sauzeau), 7 de Longe (Biraud, Pierre Boutin, Bruneteau dit Calleau, François Thibault, Jacques et Louis Vincelot, Vincelot dit Charlot), 5 de la Forêt (François et Pierre Bruneteau, Jacques Bruneteau dit Racu, Minault père et fils), 5 de la Litière (Faity, Portron, Sapin, Sauzeau, André Thoreau), 3 de la Chevraise (François Ayrault, Chartier, Minault), 3 du Courtiou (Louis Bellivier, Louis Chartier, Jean Thoreau), 2 des Ayraults (Charron, Parpais), 2 des Bouiges (Jacques et Pierre Vincelot), 2 de la Cesse (Fouquet dit Le Jean, Gautier dit le Pannassier), 2 de la Guérinière (Ingrand et Thomas Quintard), 1 de la Babinière (Jacques Sapin), 1 de la Bricauderie (Pierre Pasquier), 1 de l’Eterpe (Pierre Rivaud), 1 de Montlorgis (Quintard), 1 de Touche Moreau (Brunet), 1 de Vernay (Viault), 1 de Vitré (Louis Souché).

 

Encore des loups en avril 1880

Il y a encore des loups dans la forêt de Saint-Sauvant en avril 1880. Deux rares documents les évoquent. D’abord un arrêté du préfet, le 2 avril, ordonne « des battues au 3 au 15 avril dans les bois de la commune de Saint-Sauvant ». L’organisation en est simplifiée. Alors « ces battues auront lieu sous la direction de M. le maire et sous la surveillance de la gendarmerie ». Pierre Minault, le maire, en informe l’Administration des forêts. Le 10 avril, le Conservateur des forêts, qui conteste l’arrêté préfectoral ne lui « ayant pas paru en tous points conforme aux règlements sur la matière », demande au maire « de surseoir à toute battue » jusqu’à ce qu’il ait reçu de nouveaux ordres de la préfecture.

 

On ne sait pas si les loups ont eu vent de ce contre temps administratif. Et s’ils ont dansé de joie dans la forêt …

Guy Puaud


La flore locale

 

ORCHIDÉES DE CHEZ NOUS

 

Marie-Hélène Jeanneau

 

Orchidée : ce mot évoque pour beaucoup d'entre nous raffinement, sophistication, exotisme. Bien qu'elles soient de nos jours disponibles chez tout bon fleuriste, ces fleurs étonnantes font toujours rêver. En posséder une reste une marque d'élégance et de distinction et la faire refleurir, d'habileté toute particulière.

Ce que l'on sait moins c'est que toutes les orchidées ne sont pas tropicales : on ne compte pas moins de 140 espèces françaises, dont une cinquantaine dans notre région. Ce sont toutes des espèces terrestres1 de taille relativement modeste, certes, mais tout aussi fascinantes que leurs cousines exotiques si l'on y regarde d'un peu plus près.

Leur forme d'abord : les fleurs, regroupées en épi, ne ressemblent à aucune autre, et peuvent être diversement colorées (les espèces de couleur pourpre sont souvent appelées "pentecôtes"). Elles sont formées de 3 sépales plus ou moins dressés et colorés, de pétales quelquefois soudés en casque, et d'un labelle qui se distingue par sa forme et sa couleur : brunâtre, long et enroulé chez l'Himantoglosse ou orchis bouc, rose vif et à trois lobes chez l'Anacamptis ou orchis pyramidal, ou encore imitant un insecte (abeille, bourdon..) chez les Ophrys.

Leur mode de vie ensuite : les orchidées vivent en symbiose avec un champignon microscopique dont elles dépendent pour leur nourriture. C'est ce qui fait leur fragilité : elles ne s'installent et ne prospèrent que dans des milieux bien stabilisés. On les trouve, selon les espèces, soit dans des prairies naturelles, qu'elles soient sèches et calcaires, ou plus acides et quelques fois franchement humides, soit dans des milieux ombragés ou semi-ombragés (bois clairs). Mais ces habitats, peu productifs sur le plan agricole, sont partout en régression rapide. Outre les camps militaires, restent cependant de petits espaces où elles peuvent encore nous enchanter : les bas côtés des routes et des allées forestières. C'est dire l'importance de la gestion de ces espaces : un fauchage trop précoce (la plupart des espèces fleurissent en mai-juin) et surtout l'usage immodéré et de plus en plus répandu de désherbants compromettent définitivement leur repousse (beaucoup ont disparu en quelques années le long des routes).

Sur la commune de St Sauvant même, et aux proches alentours, on peut observer une dizaine d'espèces (un peu plus ou un peu moins selon qu'on inclut ou non les prairies naturelles du camp militaire d'Avon dans la zone d'observation), dont, le long des routes et des allées de la forêt domaniale :

- L'Orchis bouc (Himantoglossum hircinum), le plus élevé, domine de ses grands épis verdâtres et brunâtres aux étranges labelles enroulés qui lui donnent un air un peu fou ;

- L'Orchis pyramidal (Anacamptis pyramidalis), avec comme son nom l'indique, ses sages pyramides de fleurs rose vif (ce sont plutôt des cônes, d'ailleurs) ;

- L'Ophrys abeille (Ophrys apifera), dont le labelle imite l'insecte, attirant ainsi le mâle de l'espèce qui assure le transport du pollen après avoir visité la fleur ;

- La discrète Listera à feuilles ovales (Listera ovata).

Et aussi à d'autres endroits sur les bords des routes :

- L'Orchis verdâtre (Platanthera chlorantha) et l'orchis à deux feuilles (Plathantera bifolia) aux élégantes fleurs blanches en épis un peu lâches, et qui ne se distinguent l'un de l'autre que par la disposition des étamines et leur date de floraison ;

- l'Homme-pendu (Aceras anthropophora), au labelle si caractéristique en forme de petit bonhomme ;

- l'Orchis mâle (Orchis mascula), à épi pourpre et feuilles tachetées de brun.

 

Ces plantes plutôt discrètes, étonnantes et fragiles, font partie intégrante de notre patrimoine. Si nous voulons les admirer encore longtemps il est important de les respecter et de respecter leurs milieux si modestes soient-ils. Il faudra en particulier :

- Ne pas les cueillir (ce ne sont pas de bonnes fleurs à bouquets), et apprendre à nos enfants à observer sans détruire.

- Veiller, chacun à notre niveau, à un usage modéré des désherbants, afin de préserver des habitats, même restreints, de type prairie naturelle à la flore riche et variée.

- Ne pas faucher trop tôt.

Et, sur le bord de nos routes et de nos chemins, ou dans un coin de notre jardin où la végétation sera laissée plus libre, peut-être aurons nous la joie de voir s'installer (ou se réinstaller) l'une ou l'autre de ces belles exigeantes…

e e e

 

Pour en savoir plus : Guérin Jean-Claude, Mathé Jean-Michel, Merlet André, Orchidées de Poitou-Charentes et Vendée, Edition Méloé, 1995, 96 p. Ce petit guide décrit très clairement les espèces présentes dans notre région, avec dessins, photos, répartition et période de floraison.

 

1 De nombreuses espèces tropicales sont épiphytes, c'est à dire qu'elles poussent sur une autre plante qui lui sert simplement de support.

Ophrys apifera

Orchis mascula

 

 

Himantoglossum hircinum

Anacamptis pyramidalis

 

 

Aceras anthropophorum

Listera ovata

 

 

Plantanthera chloranta

Platanthera bifolia